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pour suivre l'éruption du volcan Eyjafjallajokull
à Fimmvörðuháls du 20 mars
au 13 avril 2010. Cette fois, l'éruption
a pris une nouvelle tournure plus destructrice.
Alors que l'éruption à Fimmvörðuháls
est terminée, le magma s'est frayé
un nouveau chemin vers la surface juste sous la
calotte du glacier provoquant une éruption
sous-glaciaire et son cortège de conséquences
: gros panache de cendre et de vapeur, explosions
phréatiques, fonte massive de glace, jökulhlaup
(terme islandais désignant une coulée
de boue dévastatrice constituée
de débris rocheux, de cendres et de glace
fondue), crue brutale des rivières
glaciaires et inondations. Voici la chronologie
des événements.
--> Mercredi 14
avril 2010
Le trémor annonciateur
de l'éruption a commencé hier vers
23h00. Il a duré jusqu'à 8h16 quand
les premiers signes sont apparus au sommet de
l'Eyjafjallajökull. Plus de 100 secousses
ont été enregistrées sur
ce laps de temps. Malheureusement cette fois,
la source des séismes est bien située
sous la calotte de glace à la verticale
du cratère sommital.
A 2h du matin, la route qui passe
au pied du glacier Eyjafjallajokull a été
fermée à la circulation entre Hvolsvöllur
et Skogar en raison du risque d'inondation. Les
habitants de Fljótshlíð et ses
alentours ont été évacués.
La source des séismes se trouve à
environ 4 km au sud du pic de Gigi. Une vingtaine
de fermes sont menacées d'inondation de
l'est de la rivière Markarfljot à
l'ouest de Skogar. Depuis 23h00, la région
est en état d'alerte maximum. Le risque
de jokulhlaup est très sérieux.
Il ne faudra pas plus de 30 minutes à la
glace fondue pour atteindre les premières
habitations si le magma arrive en surface. La
Protection civile a finalement décidé
d'évacuer toute la région soit 700
personnes comme dans la nuit du 20 au 21 mars.
Les fermiers ont été invité
à ouvrir les barrières voire couper
les clotures pour permettre à leur bétail
de se réfugier sur une colline quand la
crue surgira. A 5h00, le foyer des séismes
ne se trouve plus qu'à 1,1 km de profondeur.
Tout le monde est à l'abri et on attend
...
L'éruption a démarré
peu avant 7h selon les scientifiques et les mesures
de l'IMO mais cela n'a été confirmé
visuellement que vers 9h. Les géologues
qui ont survolé l'Eyjafjallajökull
à bord de l'avion de la Garde Côtière
disent qu'une large fracture orientée Nord/Sud
est apparue dans le cratère sommital. Cette
fois, on parle bien du cratère central
de l'Eyjafjoll, celui situé au sommet sous
le glacier. La caldeira fait 2,5 km de diamètre
et est remplie de glace qui commence à
fondre sous l'effet de la chaleur. Peu après
9h, le trou apparu dans la calotte mesurait 200
m de diamètre. Néanmoins, l'éruption
et la fissure était invisible à
cause des nuages. Seul l'équipement radar
de l'avion permettait de voir à travers
la masse nuageuse et d'estimer la longueur de
la fissure à 500 m. Voir images
radar. Autres signes que l'éruption
a démarré : le débit des
rivières glaciaires augmente rapidement
et un panache de fumée a été
vu au dessus du glacier.
La webcam de Thórólfsfell
a été déplacée à
Hvolsvollur
pour surveiller le sommet de l'Eyjafjoll et celle
de Fimmvorduhals remise en service. Il y a des
retombées de cendre sur Fimmvorduhals et
les particules chassées par le vent défilent
devant la caméra. Il est 13h00 et cette
fois, on voit clairement le panache de vapeur
et de cendres sur la webcan de Valahnjukur.
Cette éruption est beaucoup plus forte
que celle de Fimmvorduhals et on n'a malheureusement
plus affaire à un volcan "touristique"
mais à une éruption sous-glaciaire
à la force destructrice.
Des torrents de glace fondue
mélée de cendres s'écoulent
de la nouvelle fracture par le nord et le sud.
Au nord, les flots sombres dévalent le
long de la langue glaciaire de Gigjokull et ont
envahi le lagon avant de se déverser dans
la rivière Markarfljot en emportant la
passerelle piétonnière. De 7h à
10h, le niveau de l'eau est passé de 75
cm à plus de 5 m. Ensuite, on n'a plus
de mesure, la sonde ayant été arrachée
en même temps que la passerelle.
La rivière Markarfljot
est en crue depuis 11h. Son niveau est monté
de 2,1 m et le pic maximum a été
atteint à midi. Le débit est de
1000 m3 par seconde. Voir vidéo
sur visir.is. La débacle a atteint
le vieux pont et percé un trou dans la
digue avant de se diriger vers la route de Thorsmork.
Afin de prévenir la destruction du nouveau
pont, 3 brèches ont été volontairement
ouvertes dans la route circulaire n°1 pour
permettre aux flots bouillonnants de s'écouler
plus facilement vers la mer. Un jokulhlaup s'épanche
également vers le sud et la boue a inondé
les paturages de la ferme de Thorvaldseyri situé
au pied de l'Eyjafjöll.
45 personnes sont coincées
à Langidalur dans la vallée de Thorsmork.
Elles y sont en sécurité mais ne
peuvent quitter la vallée car la piste
est coupée par l'inondation.
L'éruption émet
beaucoup plus de cendres que celle de Fimmvorduhals
et l'énorme panache de fumée monte
jusqu'à 11 km d'altitude et se répand
vers le nord-est. Voir vidéo
du panache. C'est pourquoi l'espace aérien
au nord et à l'est de la zone d'éruption
a été interdit vers 13h. Les vols
domestiques vers Egilsstadir et Hornafjordur sont
annulés. Il est probable que l'interdiction
s'étende bientôt au couloir aérien
vers la Norvège et la Russie. Voir carte
des prévisions. L'aéroport national
de Keflavik situé à l'ouest n'est
pas concerné bien que le trafic aérien
subira certainement des déviations pour
contourner la zone dangereuse. Au fil de la journée,
le nuage volcanique est devenu de plus en plus
noir et menaçant alors que la fracture
s'était étendue à 2 km de
long en début d'après-midi.
Le bulletin de 16h diffusé
par ruv.is
(vidéo ci-dessus) montre des images aériennes
des zones inondées et des dégâts.
Quelques photos
aériennes sont visibles sur le site
de l'IMO. L'Institute of Earth Sciences a publié
un bon
résumé en anglais. Intéressante
série
de photos publiée par Libération.
Le plus gros de la crue étant
passé, une partie des personnes évacuées
ont pu rentrer chez elles dès 20h. La ferme
de Thorvaldseyri, une des plus grosse exploitation
d'Islande (200 vaches) a subi de gros dégâts,
la coulée de boue ayant dévasté
et pollué ses champs. La route et les jardins
de Seljalandsfoss
n'ont pas été épargnés
non plus. Par contre, les ponts ont résisté.
Grâce aux brèches percées
dans la route N1, le niveau de l'eau est resté
inférieur aux plateaux des ponts évitant
qu'ils ne soient submergés et emportés.
Le graphique ci-dessous montre l'évolution
du niveau de la rivière Markarfljot au
cours de la journée.
Alors que la décrue était
bien amorcée depuis le début d'après-midi,
une nouvelle hausse du niveau de la Markarfljot
a été enregistré dès
18h30 obligeant les ouvriers et pelleteuses déjà
occupés à réparer la route
à battre en retraite. Après le pic
de 20h, le niveau est à nouveau redescendu
pour retrouver sa valeur normale à minuit.
Cette crue a été moins grave que
celle du Grimsvötn en 2004 et encore moins
que les tristement célèbres débacles
du Katla.
Les retombées de cendres
sont très importantes à l'est du
volcan ce qui constitue un danger pour le bétail.
Les agriculteurs sont invités à
fournir de l'eau potable aux animaux et éviter
qu'ils ne boivent des eaux stagnantes. Les chevaux
et moutons qui étaient dehors ont été
rassemblés et mis à l'abri à
l'intérieur. En soirée, la Norvège
a été obligée de fermer son
espace aérien au nord du pays en raison
du nuage de cendre. Demain, il est fort probable
que l'interdiction s'étende au reste de
la Norvège, à la Suède et
à la Russie. Tout le trafic aérien
risque d'être perturbé dans le nord
de l'Europe.
--> Jeudi 15 avril
2010
On peut dire que le nuage
volcanique a plus que perturbé le trafic
aérien aujourd'hui. Il l'a carrément
paralysé. Les espaces aériens nationaux
ont été fermés les uns après
les autres et tous les vols annulés en
Angleterre, Ecosse, Irlande, Danemark, Norvège,
Finlande, Suède, Belgique, Pays-Bas, Allemagne
et au nord de la France. Après Lille, ce
sont les aéroports de Paris qui fermeront
dans la soirée. Au total, 25 aéroports
français sont concernés. En Belgique,
le nuage de cendre est attendu pendant la nuit
mais tous les vols ont été annulés
dès 16h30. La fermeture de l'espace aérien
durera jusqu'à vendredi 18h00 ou plus ...
en fonction de la météo. Il faut
de 24 à 48h pour que le nuage de cendres
se disperse.
Au delà de 8000 m d'altitude,
il existe un courant de vent violent appelé
jet stream qui se déplace d'ouest en est
en entraînant le nuage de particules à
plus de 220 km/h vers nos contrées. Les
cendres risquent non seulement de bloquer les
réacteurs d'avion mais elles ont aussi
un pouvoir abrasif sur les carlingues et les hublots
et risquent de détraquer les instruments
de bord en bouchant les capteurs des appareils
de mesure. L'article Ash
and crash (rédigé en français)
rappelle les incidents qui ont amené Eurocontrol
à prendre les mesures de précaution
actuelles.
Revenons en Islande. Aux abords
du volcan, l'air est tellement saturé de
poussières volcaniques qu'il est devenu
irrespirable. Le ciel est assombri et il règne
une atmosphère irréelle. La Protection
Civile recommande aux habitants de porter des
masques. Les cendres retombent en abondance sur
l'est du pays. On n'en avait plus vu autant depuis
l'éruption du Katla en 1918. Ce qui n'est
pas rassurant puisqu'à l'époque
beaucoup de fermiers avaient perdu tout leur cheptel
mort empoisonné par le fluor contenu dans
les cendres. A certains endroits la couche mesure
plus de 3 cm d'épaisseur. Ce que vous voyez
sur ces photos
prises près de Kirkjubaejarklaustur n'est
pas de la neige mais de la cendre. Les particules
sont fines comme de la farine et de couleur grise
à noire. Voici un extrait du journal télévisé
diffusé sur ruv.is.
Le nuage qui couvre le glacier rend difficile
toute observation de l'éruption. La réparation
de la route N1 est en cours.
20h00 :
nouvelle alerte d'inondation majeure. La
Protection Civile craignant que les digues ne
résistent pas à cette nouvelle débacle,
a ordonné l'évacuation urgente des
districts de Fljótshlíd et Landeyjar.
L'eau surgit du dessous de la langue glaciaire
de Gigjokull à une vitesse de 10 km/h.
Elle transporte des icebergs de la taille d'une
voiture. Cette fois les ponts sont condamnés.
La digue du mont Thórólfsfell a
déjà cédé et l'inondation
se rapproche de la digue de Háamúlar.
Les ouvriers qui réparaient la route ont
dû à nouveau quitter la zone.
Plus de peur que de mal au final.
La décrue s'est amorcée après
le pic de 21h. La rivière Markarfljot charrie
beaucoup de glace et de boue. Les eaux qui ont
adopté une couleur brun rouge s'écoulent
par les brèches de la route circulaire.
Bien que cette crue fut plus puissante que celle
d'hier, son niveau est resté à 1/2
m sous le pont. Les icebergs localisés
à Gigjokull n'ont pas été
emportés par les flots jusqu'au pont. Il
l'a encore échappé belle.
--> Vendredi 16
avril 2010
Amis
voyageurs cloués au sol depuis hier, voici
la gueule du monstre responsable de tous vos malheurs,
celui qui a perturbé le cours de votre
vie, vous faisant raté le mariage de votre
fils ou le banquet d'anniversaire de la reine
du Danemark, votre départ en vacances,
votre retour chez vous en Australie ou à
Genève, votre convocation au tribunal de
Montpellier. Ces exemples sont hélas véridiques
! Voilà la tête du coupable dont
les éructations ont réussi à
faire ce qu'aucune guerre, aucun attentat ni grève
n'était parvenu à obtenir : la fermeture
totale de l'espace aérien nord européen
et l'interruption du trafic trans-atlantique.
Voici enfin, celui qui a fait exploser le nombre
de mes visiteurs.
Cette photo a été
prise hier par la caméra spéciale
de l'avion de l'Icelandic Coast Guard. On y voit
trois bouches éruptives de 200 à
500 m de diamètre qui ont fait fondre la
glace autour d'elles.
Les conditions météorologiques
font stagner et s'étaler le nuage de cendres
au dessus de nos têtes et après les
pays d'Europe de l'Ouest, ce sont les avions d'Europe
de l'Est qui sont restés cloués
au sol. En Belgique, la fermeture de l'espace
aérien est prolongé jusqu'à
demain au moins. Certaines compagnies ont d'ores
et déjà annoncé l'annulation
de tous leurs vols ce week-end. Quelques aéroports
ont été rouverts momentanément,
notamment en Ecosse et en Irlande.
En Islande, les cendres continuent
de retomber à l'est du volcan. Elle contiennent
un taux élevé de fluorures (25-35
mg/kg) et sont donc toxiques pour les humains
et le bétail en cas d'inhalation ou d'ingestion.
Cette vidéo
permet de se rendre compte de l'ampleur des
retombées de cendre.
Plusieurs crues se sont succédées
durant la nuit et la matinée mais leur
niveau était inférieur au maximum
atteint le 14 avril (830 cm). La réparation
de la route sera terminée cette nuit ou
demain. Une partie avait été emportée
sur 400 m près de la cascade de Seljalandsfoss.
Les débacles peuvent surgir à tout
moment tant qu'il y aura de la glace dans le cratère.
Les volcanologues ne peuvent
qu'émettre des suppositions sur la durée
de l'éruption mais en se basant sur la
dernière fois (1821-1823), ils laissent
entendre qu'elle pourrait durer plusieurs mois.
Bien sûr, une fois la cheminée volcanique
débarassée des roches qui l'obstruent,
la quantité de cendres émises devraient
diminuer. On est dans ce qu'on appelle la phase
de débourrage. L'Eyjafjallajokull est en
train de nous faire une démonstration de
toutes les facettes de sa nature.
C'est en effet un strato-volcan,
tantôt explosif, tantôt effusif. Pendant
trois semaines, nous avons assisté à
sa nature effusive avec l'éruption fissurale
de Fimmvorduhals caractérisée par
des fontaines de lave et des coulées de
basalt. A présent, nous avons affaire à
une éruption sous-glaciaire avec explosions
phréato-magmatiques violentes, grosse émission
de cendres et de vapeur et jokulhlaups. La couleur
des cendres qui est passée du noir au gris,
laisse penser que le basalt a fait place à
un magma rhyolitique plus riche en silice, plus
épais et donc plus explosif. Lire le très
intéressant rapport
du Reykjavik Grapevine (en anglais). Les analyses
confirment la différence de teneur en silice,
47% pour l'éruption à Fimmvorduhals
contre 58% pour celle du cratère sommital.
Dans l'après-midi, le
soleil est revenu sur le sud de l'Islande, permettant
enfin de voir sur les webcams des images fascinantes
du gros panache volcanique qui aujoud'hui a franchi
les 30.000 pieds soit plus de 9 km d'altitude.
--> Samedi 17 avril 2010
Pour commencer la journée,
nous allons apprendre à prononcer correctement
le nom de ce foutu volcan. Phonétiquement,
cela donne : EY-ya-fyat-lah-YOH-kuht. La vidéo
compile les tentatives malheureuses des reporters
étrangers alors que le fichier mp3 vous
fournit la prononciation exacte.
Cette nuit entre minuit et 4h30,
plus de 22 éclairs
ont été enregistrés au dessus
du cratère. C'est plus que sur la journée
entière d'hier. La fréquence des
éclairs est plus ou moins en corrélation
avec la hauteur du panache. Ces décharges
électriques sont courantes lors des éruptions
volcaniques car il y a énormément
d'électricité statique générée
par la friction des particules en mouvement dans
les panaches. Il faut dire que l'activité
a été très intense la nuit
dernière avant de se calmer au petit matin.
Le vent a tourné et souffle
maintenant du nord avec force, rabattant ainsi
le panache de cendres vers le sud, la mer et les
îles Vestmann. Les fermiers locaux qui se
souviennent très bien de l'éruption
de l'Eldfell en 1973
sont inquiets car ils n'ont pas eu le temps ni
les moyens d'aller rechercher leurs moutons qui
broutent sur les îles inhabitées
de l'archipel. Au pied du volcan, il fait nuit
en plein jour. Le nuage est très dense
entre Nupur et Vik. Quand on approche par l'ouest,
c'est comme rouler dans un mur selon les témoins.
La visibilité dans la cendre est nulle.
La preuve en images ... sur ruv.is
et ci-dessous.
Vidéos tournées le 17 avril
à 13h30 par Páll Stefánsson pour
Icelandreview.com
Presque tous les aéroports
européens étaient fermés
aujourd'hui. Cette situation devrait durer jusqu'à
dimanche voire lundi. La capture d'écran
du site flightradar24.com ci-dessus montre les
avions qui étaient en vol vers 15h00 au
dessus de l'Europe. On voit à quel point
le ciel est vide ...
--> Dimanche 18 avril 2010
Depuis que le volcan attire sur
lui tous les regards européens, la webcam
de Vodafone ne peut plus supporter autant de trafic
(surtout le serveur en fait) et a été
remplacé par une galerie
photo Picasa. Il n'y a plus eu la moindre
inondation depuis vendredi matin et l'activité
sismique est totalement calmée. Par contre,
le volcan continue de cracher son panache de cendres
et de vapeur en haute altitude.
Les autorités ont recommandé
aux fermiers du sud et du sud-est de rentrer leurs
chevaux aux écuries ou de les déplacer
vers des zones plus sures. Le danger vient bien
sûr toujours du fluor contenu dans les cendres
qui polluent l'air, l'eau et le fourrage. A forte
dose, le fluor est toxique chez les humains et
les animaux car il se fixe dans les os et les
dents à la place du phosphore et les rend
fragiles et cassants. Les juments enceintes et
les poulains en pleine croissance sont particulièrement
visés.
Le danger pour les oiseaux est
bien plus immédiat. Ils n'ont malheureusement
aucun abri ni aucune conscience de ce qui se passe.
En entrant dans le nuage de cendres, leurs ailes
ont beau battre l'air, elles ne trouvent plus
aucune portance. De plus, les plumes chargées
de cendre s'alourdissent et perdent leur profil
aérodynamique. Bref, les oiseaux tombent
et meurent au sol. C'est assez dramatique vu que
la saison des migrations vient de débuter.
Un observateur a vu hier un vol d'oies sauvages
disparaîtrent ainsi dans la tourmente.
Ce matin à 4h48 GMT, l'éruption
semble arrêtée. Sur les webcams, on voit uniquement
un long nuage blanc qui caresse le glacier. Est-ce
possible ? Non, c'est juste le vent du nord qui
souffle si fort que le panache est rabattu au
sol. Je me disais bien ... C'est donc de nouveau
la bande de terre au sud du volcan, la mer et
les Îles Vestmann qui vont déguster
aujourd'hui ... un léger goût de
cendre. Pour les autres, le soleil brille sur
un ciel sans nuage. Qu'ils en profitent car demain
il va pleuvoir et le vent soufflera les cendres
vers Reykjavik. Que du bonheur ! L'école
de Vik est fermée à cause du vent
violent qui soulève et balaie les particules
de cendre. L'épaisseur au sol atteint 10
cm par endroit.
La route circulaire n°1 est
réparée mais toujours fermée
au public de Hvolsvöllur à Skógar.
Elle est réservée aux secours et
aux urgences. Elle n'a pas encore été
réasphaltée mais est praticable.
Bien évidemment, en raison de multiples
dangers, les touristes ne sont pas autorisés
dans la région du Eyjafjallajokull, ni
sur le site de Fimmvorduhals ni sur ou aux abords
du glacier Myrdalsjokull. Entre les retombées
de cendres, les vents changeants et les éclairs
qui zèbrent le panache, la situation est
trop hasardeuse pour permettre le tourisme.
Face aux lourdes conséquences
financières, économiques et humaines
qu'entraîne le blocage prolongé des
espaces aériens en Europe, certains vols
ont été autorisés aujourd'hui
à plus basse altitude que d'habitude. Voici
quelle était la situation du trafic aérien
vers 14h30. C'est pas encore la cohue mais au
moins quelques avions revolent.
L'Institute
of Earth Sciences a publié une estimation
chiffrée du volume de matière volcanique
éjectée par l'éruption sommitale
du Eyjafjallajökull durant les 3 premiers
jours. Les produits ont été émis
sous forme de fragments, essentiellement de fins
téphras aériens (càd cendres
et lapillis mais pas de coulée de lave).
Les téphras ont été classés
en 3 catégories :
30 millions de m³
se sont déposés dans les chaudrons
de glace autour des bouches éruptives
10 millions de m³ ont été
entraînés par les crues et remplissent
le lagon glaciaire de Gígjökull
100 millions de m³ retombent du panache
en pluie de cendres sur l'est et le sud du pays
Soit un total de 140 millions
de m³ non compacté. Ça correspond
à un volume de magma de 70 à 80
millions de m³. Le débit moyen de
magma éjecté sous forme d'aérosol
est d'environ 300 m³/sec soit l'équivalent
de 750 tonnes/sec. C'est 10 à 20 fois plus
que l'éruption qui a eu lieu à Fimmvörðuháls
sur le flanc est du volcan.